Thèmes / Culture

Lundi soir prochain, le 14 mai, aura lieu un événement rare dans le monde politique : un 5 à 7 poétique, dans un bar célèbre de la Petite-Patrie, le Petit Medley. De quoi s’agit-il?

J’ai décidé, avec l’appui de mon association locale, d’organiser une petite soirée à l’enseigne de la poésie. Une soirée de financement pour ma campagne électorale. Mais surtout un beau moment d’écoute et de partage autour de poètes et d’écrivains qui mettent des mots sur nos états d’âme. Qui sont-ils?

D’abord, Brigitte Haentjens, formidable metteure en scène et auteure. Son dernier livre « Une femme comblée » est une petite merveille. Écrit en vers, le livre raconte un amour foudroyant et voué à l’échec. Une femme d’âge mûr aime un jeune homme et ne sait comment échapper à ce sentiment qui l’envahit tout entière. Brigitte Haetjens nous lira quelques passages de ce beau livre. Thomas Hellman est un auteur-compositeur interprète à la voix d’or. Je l’ai rencontré au combat des livres où il défendait courageusement le livre « L’homme invisible » de l’auteur franco-ontarien Patrice Desbiens. Un beau livre sur l’identité. L’audace de Thomas m’avait impressionnée. Je l’ai ensuite entendu lire des textes et chanter à la 5e salle de la Place des Arts. Un rêve! Thomas Hellman est un homme de culture, de mots magiques, tout en sensibilité. Il vous plaira!

Paul Bélanger, poète, auteur d’une dizaine de recueils, est aussi professeur en littérature à l’UQAM. Il est le directeur apprécié et persévérant de la maison d’édition le Noroît qui publie de la poésie québécoise. Il viendra lui aussi partager ses mots et ses images fabuleuses avec nous. Amir Khadir est député mais aussi amoureux de poésie. On l’a vu dans des discours électoraux réciter du Godin ou du Miron! Lundi prochain, il nous lira un poème perse, issu de la magnifique tradition littéraire iranienne.

Et puis, nous demanderons aux personnes présentes de nous lire un poème de leur choix. Bref, une heure trente de pur bonheur pour rechercher les batteries, comme on dit!

Ça se passe au Petit Medley, rue St-Hubert, coin Bellechasse, le 14 mai, à 17 heures. Il faut s’inscrire sur le site de Québec solidaire. Coût des billets : 50$ (30$ pour personnes à revenu modeste). On paie à la porte.

Venez vous faire du bien!

Françoise David

Au terme de quatre soirées-rencontres avec des centaines de gens de mon comté, je retiens leur  vibrant intérêt pour ce qu’on appelle souvent « la politique autrement » et pour des idées novatrices. Celles de Québec solidaire.

Ils et elles sont venus des quatre coins de la Petite-Patrie et de Rosemont. Le même scénario s’est répété à chaque fois : à 18.45 hrs, nous étions une demi-douzaine à nous demander si les gens seraient au rendez-vous. À 18.55 hrs, une petite foule  compacte cherchait, qui  une chaise, qui un tabouret ou plus prosaïquement, un café ou une bière. À 19.10 hrs, nous étions entre 40 et 70, souvent tassés comme des sardines  et la conversation commençait.

Certaines questions sont revenues à chaque rencontre : comment développer une économie prospère et en même temps écologique? Comment nous assurer que l’État québécois ait les moyens de redistribuer la richesse? Quelle est la position de Québec solidaire sur le plan Nord, la langue, l’éducation, la privatisation du système de santé, le mode de scrutin.

Ce qui m’a beaucoup frappée : les participants-es étaient souvent dans la trentaine.  Avides de nouvelles idées, d’espoir, de politiques porteuses de sens. Solidaires.

On a parlé  de souveraineté. Après tout, nous sommes dans Gouin, une circonscription qui a largement voté oui en 1995. La proposition de Québec solidaire de mettre en place une assemblée constituante élue au suffrage universel pour organiser les débats sur l’avenir du Québec,  produire un projet de constitution et soumettre le tout à un référendum, a séduit. Pourquoi? Parce que c’est mobilisant, rafraîchissant, dynamique. Parce que QS a confiance dans la capacité des citoyennes et citoyens de discuter d’un projet de société et de l’avenir du Québec. Confiance qu’une fois engagés dans une démarche collective, les Québécoises et les Québécois auront vraiment le goût du pays.

Évidemment, la question de la division du vote souverainiste a été soulevée. Normal. Nous en avons discuté franchement. Faut-il le rappeler : dans Gouin, une victoire souverainiste est assurée car ni la CAQ ni les Libéraux n’ont la moindre chance de l’emporter. Il s’agit donc pour les électrices et électeurs de ce comté de décider pour lequel des candidats souverainistes, en l’occurrence monsieur Girard et moi-même, ils voudront voter.

Le choix existe et nous en avons débattu. Pour des participants-es aux soirées, le PQ a « fait son temps », comme on dit. Certains-es n’en peuvent plus des positions changeantes de ce parti suivant les conjonctures : plus à droite quand l’ADQ est en avance, plus à gauche quand QS commence à être une menace pour le PQ dans certains comtés.

On regarde donc du côté de Québec solidaire. Un parti aux convictions solides. Les personnes que j’ai eu le bonheur de rencontrer étaient  curieuses et  intéressées par ce nouveau parti qu’elles apprivoisaient lentement…mais sûrement.

Elles et ils sont de plus en plus nombreux à appuyer un parti à la fois souverainiste, écologiste, féministe et de gauche. Loin de les inquiéter, notre parti-pris pour les travailleurs-euses, les personnes  âgées, pauvres ou immigrantes, pour toute la classe moyenne,  sourit à nombre de personnes. Car de plus en plus de gens se sentent partie prenante du fameux 99% et sont scandalisés par l’arrogance des bien-nantis.

On m’a demandé, au cours d’une soirée, si j’avais l’intention de poursuivre ces rendez-vous citoyens  une fois élue. Ma réponse fut sans équivoque : oui! C’est entre autres cela, faire de la politique autrement : rendre des comptes à la population et la consulter sur les dossiers que l’on doit défendre à l’Assemblée nationale.

Je me sens nourrie par les questions et prises de position de toutes ces personnes de mon quartier qui sont venues discuter avec moi. Plusieurs ont donné leur nom pour être bénévoles lors de la campagne électorale.  Il y aura d’autres rendez-vous, c’est certain!

Merci à toutes celles et à tous ceux qui ont participé aux soirées-rencontres de février.  Merci au comité de coordination de QS-Gouin qui les a organisées.

Françoise David

Montréal, le 13 décembre 2011

Monsieur,

Ce midi, nous devions enregistrer l’émission « L’autre midi à la table d’à côté ». C’était prévu depuis des semaines! Nous devions manger ensemble, vous et moi, et nous parler de nos livres respectifs. De nos visions du monde aussi, je le suppose.

Je m’étais bien préparée. J’avais lu votre livre, écouté votre entrevue aux Francs-Tireurs, réfléchi aux questions que je voulais vous poser. Mais hier, vous avez décidé de ne pas participer à l’émission, prétextant que vous ne vouliez pas être associé à un parti politique.

Allons donc! Vous saviez  que je suis la présidente et l’une des porte-parole de Québec solidaire! Je n’en fais pas mystère dans mon livre. Vous êtes millionnaire. Jarislowski Fraser est une société de gestion privée de renom. Je suis la présidente d’un parti politique de gauche. Il aurait été intéressant de débattre, non?

Voici les questions que je vous aurais adressées :

1)      Dans votre livre (Dans la jungle du placement) vous dénoncez « les rapaces qui peuplent la jungle du placement ». Vous pourfendez les membres de Conseils d’administration de grandes entreprises; vous vous demandez s’ils sont gardiens ou laquais des gros actionnaires.  Vous dénoncez les trop hauts salaires des dirigeants d’entreprises. Vous croyez vraiment que l’on peut civiliser ces capitalistes trop gourmands? Je crois, moi, que seule une action politique ferme de la part des élus du peuple nous permettra d’en finir avec leur arrogance.

2)      Vous donnez des conseils aux gens qui veulent effectuer des placements. Pas une seule fois vous n’évoquez les placements éthiques. Pourquoi ne pas suggérer  aux petits épargnants d’éviter des entreprises guerrières, celles qui font travailler des enfants ou sont néfastes pour l’environnement?

3)      Vous vous plaignez de l’avidité du fisc. Pourtant vous convenez que nous avons besoin de routes et de services publics. Vous ajoutez même (page 152) : « En réalité, les particuliers aident souvent des causes qui devraient bénéficier de nos impôts ». C’est de la pauvreté que vous parlez dans cette page. Expliquez-moi comment nous allons lutter contre la pauvreté, nous doter d’un système de santé performant et accessible à tout le monde, d’une éducation de qualité, de transports collectifs…et payer moins d’impôts.

4)       Le 6 octobre 2010, Warren Buffet, troisième fortune mondiale s’exprimait ainsi dans un texte de l’agence France-Presse : «  Je paye un plus bas taux d’imposition que ma femme de ménage et ce n’est pas comme cela que le système devrait fonctionner ». Monsieur Buffet réclamait alors de payer plus d’impôts pour aider son pays à sortir de la crise dans laquelle les grands financiers l’avaient plongé. Et vous, monsieur Jarislowski, accepteriez-vous de payer plus d’impôts pour permettre à l’ensemble des Québécois-es d’obtenir un revenu minimum leur permettant de vivre dans la dignité?

5)      Vous avez étudié dans les meilleures écoles françaises et américaines. Vous avez eu de la chance. J’ai moi-même eu le privilège d’étudier dans des collèges privés. Vous vous prononcez pourtant en faveur de la hausse des droits de scolarité universitaires. Ne croyez-vous pas qu’il y a là une contradiction? Nous qui avons eu la chance de poursuivre des études universitaires, ne devrions-nous pas souhaiter que tous les jeunes du Québec aient cette même chance?

Et finalement, vous parlez de votre « philosophie altruiste ». Vous indiquez : « Aider les autres m’a beaucoup rapporté » (page 27). Moi je vous demande : ne pensez-vous pas qu’aider les autres passe par la justice sociale bien avant la charité, par l’accès à la culture (qui vous est chère) pour tout le monde, par des services publics qui demeurent publics, par le respect du droit à l’association syndicale, par une fiscalité réellement progressive?

Si vous aviez pris le risque de débattre avec une femme de gauche, féministe, écologiste et souverainiste, nous aurions parlé de ces choses et de bien d’autres. Passionnément et avec courtoisie. Pourquoi vous être si soudainement dérobé à cet exercice? Un grand administrateur et investisseur appartenant au groupe sélect du 1% craindrait-il de se commettre avec une personne dont les préoccupations solidaires sont au diapason de l’autre 99%?

C’est ma dernière question…

Françoise David

Ainsi donc la Caisse de dépôt et de placement du Québec, fleuron de notre économie, embauche des cadres supérieurs unilingues anglophones.  Les comités d’investissement du groupe immobilier Ivanhoé Cambridge, filiale de la Caisse, se passeraient généralement en anglais.

Nous pensions que seul Stephen Harper avait le culot de choisir des juges unilingues anglophones à la Cour suprême? Détrompons-nous, l’embauche de cadres unilingues à la Caisse de dépôt, ça se passe au Québec et ce sont des Québécois qui procèdent à ces embauches. On me dit que cette situation existe aussi dans de grandes entreprises québécoises, mondialisation oblige (disent-elles!).

On s’étonnera après cela que des jeunes Québécois veuillent être bien certains de parler couramment anglais lorsqu’ils se préparent à entrer dans les milieux de travail! On se demandera pourquoi des immigrants-es francophones se mettent à apprendre l’anglais!

La connaissance de l’anglais, comme de d’autres langues, est une richesse pour quiconque. Mais je m’indigne devant ces entreprises qui exigent l’anglais à l’embauche même lorsque cela n’est pas nécessaire. Je m’insurge devant ces cadres unilingues anglophones, incapables de communiquer en français avec leurs employés. Voyez les propositions de Québec solidaire sur le français langue de travail à : http://tinyurl.com/3t7thnf

Le combat de la langue est plus que jamais nécessaire. Parce que le français, c’est notre passeur de culture. Parce que la culture québécoise est riche, variée, qu’elle nous rassemble au sein de la nation. Parce que le peuple du Québec se bat pour sa survie depuis 400 ans et veut durer au coeur d’un continent anglophone. Parce que la planète vibre d’identités diverses et que l’homogénéité culturelle, dominée par l’anglais actuellement et par la culture américaine, pourrait nous faire perdre cette diversité culturelle.

J’espère que l’enquête menée par l’Office de la langue française à la Caisse de dépôt va déboucher sur des correctifs réels et immédiats. J’espère que nous serons nombreux à protester!

Françoise David

C’est la question que je me suis posée en lisant le communiqué écrit par l’Office québécois de la langue française. Oui si la proportion de francophones continue d’être au -desus de 40%. Difficilement, à mon humble avis, s’il fallait que ce nombre décroisse dramatiquement. S’il fallait, par exemple, que l’on retrouve seulement 10 ou 20% de Québécois-es parlant français à la maison, dans la Métropole, quel succès aurions-nous dans la mobilisation de tous les Montréalais-es pour que les échanges personnels, commerciaux, de travail…se passent en français? Je me le demande.

D’un autre côté: qu’est-ce qu’un francophone? Selon les études de l’OQLF, c’est une personne qui parle français à la maison. Mon collègue et ami Amir Khadir, qui parle farsi avec ses filles à la table du souper, ne serait donc pas, statistiquement parlant, un francophone. Même s’il travaille, achète, milite…en français. Et connaît probablement mieux que bien des « francophones » l’anthologie de la poésie québécoise. Voilà pourquoi les choses sont plus complexes qu’on ne le dit. Il y a probablement davantage de francophones comme Amir qu’on ne le croit.

Pour moi, pour Québec solidaire, la situation du français dans la grande région métropolitaine mérite que l’on s’y penche. J’aimerais bien lire des études sur la langue parlée au travail, dans les PME mais aussi dans les grosses entreprises. Je soupçonne que l’anglais a repris beaucoup de place depuis 20 ans, depuis que l’on vit plus activement à l’ère de la mondialisation. N’est-ce pas par là qu’il faudrait commencer si l’on veut que le français devienne la langue chérie de tous-tes les Québécois-es?

En avril dernier, Québec solidaire a fait connaître 28 propositions pour protéger la langue française et lui permettre de s’épanouir pleinement. Vous les trouvez en page d’accueil du site de QS. J’aimerais beaucoup connaître votre opinion sur ces propositions.

Françoise David

 Après quatre mois d’écriture et de voyages, me voici de retour. En très grande forme. Prête à être de tous les débats, de toutes les luttes et actions pour construire le Québec que nous voulons. Prête à publier mon livre.  Prête à affronter l’échéance électorale. Avec passion.

En ce beau mois d’août 2011, ce ne sont pas les débats qui manquent. Celui qui attire le plus l’attention en ce moment, c’est sans contredit le débat stratégique pour construire le pays. Depuis longtemps nous n’avions ressenti une telle effervescence. Certains diront : une telle cacophonie. Je reçois des courriels qui me parlent de coalitions. Toutes sortes de coalitions. Les souverainistes se cherchent une maison accueillante pour tous ceux et celles qui rêvent du pays.

Le Nouveau mouvement pour le Québec

Bien sûr, j’ai lu le manifeste du Nouveau mouvement pour le Québec. Avec curiosité et intérêt. J’y ai trouvé des idées fortes, la toute première étant que l’on bâtit un pays non pas contre un autre pays pour soi-même. J’aime ça! Deuxième idée forte : donner le crayon aux Québécoises et aux Québécois. Instituer des constituantes partout au Québec. Vous savez quoi? Cette idée a été adoptée par Québec solidaire lors de son congrès de novembre 2009. Je suis heureuse de voir le Nouveau mouvement pour le Québec s’en emparer avec énergie.

Un mode de scrutin proportionnel? D’accord aussi. Élections à date fixe : idem.

Comment donc, ne pas se sentir cousins de ce mouvement citoyen?

J’ai toutefois des questions. Le manifeste présente véritablement une vision démocratique pour le Québec. Pourtant la question de la décentralisation des pouvoirs vers les régions n’est pas abordée. Puis, outre l’importance de parler par nous-mêmes à l’échelle du monde, on ne sent pas encore « le pays de projets » dont rêvent tant de souverainistes. Le pays du Québec ne devrait-il pas être celui de la solidarité sociale, celui de la justice et de l’égalité? Celui d’un développement réellement viable? Ces choses-là ne devraient-elles pas être affirmées d’emblée?

Enfin, une certaine perplexité devant cette phrase : « Plus personne n’offre de véritablement progresser, soit en bonifiant l’offre nationale, soit en refondant notre lutte et notre action commune ». Plus personne? C’est comme si les auteurs du manifeste avaient oublié l’existence de Québec solidaire. Voilà un parti souverainiste qui n’hésite pas à parler du pays. À lancer le printemps dernier,  une campagne « Pour un pays de projets » qui prendra son envol cet automne. À défendre que nous devons déjà nous assurer d’être maîtres chez-nous par le contrôle de nos ressources naturelles et énergétiques. Un parti qui se préoccupe de la langue française et a apporté en avril dernier  28 propositions pour la faire progresser.

Malaise aussi hier en lisant l’article de Denis Monière, l’un des signataires du manifeste. Il propose la création d’un autre parti souverainiste. Un autre? Pourquoi? Ce parti de militants-es dont rêve monsieur Monière,  il existe! Mais je me répète…

Je souhaite plutôt le rassemblement des forces souverainistes. Dans un mouvement le plus large possible et autonome des partis politiques.   Cela n’empêche en rien ceux-ci de donner un appui à ce mouvement. D’y collaborer au besoin, de créer des complicités.

Je défends aujourd’hui une position personnelle car les discussions à la direction de QS auront lieu dans 8 jours. D’ici là, nous restons à l’écoute et nous réfléchissons.

De l’effervescence et des débats jailliront certainement des perspectives plus qu’intéressantes pour l’avenir du mouvement souverainiste. En tout cas, je l’espère vivement.

 

Françoise David

Un fois n’est pas coutume, j’aimerais vous faire partager sur mon blogue le témoignage très inspirant que m’a envoyé Hugo Latulippe, cinéaste et auteur québécois, depuis le Forum social mondial de Dakar. Bonne lecture à toutes et tous!

Toute la semaine dernière, entre les sessions et ateliers de la ruche babélienne du Forum Social Mondial de Dakar, j’ai plusieurs fois « googlé » l’acronyme FSM pour lire ce qui s’écrivait sur nous en direct, dans les pages des grands quotidiens du monde. En tête de liste, Google s’obstinait à me suggérer le même article de Wikipédia : « FSM : Forces sous-marines, l’une des quatre grandes composantes de la marine militaire… » J’ai commencé par ne pas noter la beauté de la chose. Mais ils avaient raisons ces gestionnaires du hasard technotronique. Le peuple du FSM est effectivement une famille de l’en dessous. Une nébuleuse qui couve le feu.

Une famille

Dans cette smala parfois improbable, il y a en fait deux sortes d’artificiers. Il y a bien sûr les mangés tout crus, largement majoritaires ; les paysans du sud, les femmes africaines, les refoulés de père en fils, les va-nu-pieds de Palestine, du Tibet ou des nations aborigènes d’Amérique, les torchés vivants du capitalisme chinois, les pollués des tous les bords de la machine industrielle, les usés jusqu’à la corde des zones franches, etc. On comprend qu’ils soient là, eux. Ils ont tout intérêt à s’unir pour contrer la blitzkrieg de l’Homme blanc et son projet de terre brulée.

Et puis il y a les gens plus joufflus, minoritaires ici ; ceux qui viennent des régions « crème chantilly » du globe. Ceux qui ont pigé les meilleurs jetons de la loterie géographique. Dans leurs royaumes nordiques, ils se sont retrouvés parmi les 5% d’habitants les plus riches de la terre, sans même lever le petit doigt.

Alors, que font-ils ici ceux-là ? On peut raisonner et dire : « c’est normal, franchement, de partager un peu sa chance ! » Oui, mais il y a autre chose, puisque peu de gens de New York, de Zurich, Londres ou Paris prennent la peine de venir ici, finalement. Qu’est-ce qui mène les joufflus ici ? Un penchant irrationnel (romantique ?) pour le perdant de la loterie, peut-être. Ou alors c’est un feu. Inextinguible, vieux comme le temps. Un instinct de combat, perpétuel. Les joufflus qui sont ici sont peut-être convaincus que l’époque doit (et peut !) être basculée.

2 mamies

Je me pose ces questions en admirant deux belles mamies brésiliennes, dans la jeune soixantaine, clairement issues des classes bourgeoises, qui animent un atelier à propos du prochain sommet de Durban en 2011. C’est l’après-midi africain, il fait chaud dans les locaux de l’université. Malgré la lourdeur des nécessaires traductions en trois langues, malgré le chaos général de cette assemblée qui a tout du bordel, les deux mamies parviennent à faire respecter les temps de paroles de chacun, à nous ordonner l’indignation, à stopper la logorrhée des Français, à calmer le chaud du sang des Italiens, à minimiser les syndicalistes Américains ou à modérer le communisme des étudiants mexicains qui ont découvert Trotski la semaine passée…

Elles président l’assemblée familiale comme des reines. Les deux mamies ont l’habitude de ce boucan. Elles ont plus d’une assemblée dans le corps. Avec une fermeté presque sensuelle, elles parviennent à discipliner l’indisciplinable. Elles sont terriblement belles. Je dirais même qu’elles sont sexy. Elles font un travail remarquable, à bout de voix, pour que nous accouchions de résolutions conséquentes avant la nuit. On dirait qu’elles en font un enjeu de vie ou de mort. Mais elles nous appellent chéri, darling, corazon.

Je repense à mon ami Stéphane Imbeault, prof de philo au cégep de Rimouski. Lui, il saurait me dire. Que font-elles ici, ces mamies joufflues Stéphane ? Elles doivent pourtant être bien à la maison, sur les hauteurs de Rio ou de Sao Paulo, emmitoufflées dans leurs exceptionnelles exceptions. Or, leur cœur penche pour l’avalé des avalés. Pourquoi ?

Je suis certain que tout le monde se fixe des objectifs en les regardant. Comme moi, tout le monde doit se demander s’ils en font assez, s’ils le font avec assez de détermination ou alors avec assez d’amour… Pour ma part, autant les récits héroïques des paysannes qui portent le Mali à bout de bras m’inspirent le combat jusqu’à la fin des temps… autant ces deux mamies brésiliennes nées dans le même confort que moi me forcent à me mettre en marche. Elles sont la poursuite des Lumières. Elles sont en quelque sorte l’incarnation des poèmes de Neruda, de Withman ou de Darwich. Elles incarnent la cohérence humaniste. La droiture nécessaire, essentielle à cette époque. Je suis un fan fini de ces mamies. Je les suivrais n’importe où.

Il faut bien le dire, en ce moment, dans les Forces, tout le monde rêve d’être Brésilien. On dirait qu’ils ont pris de l’avance sur l’humanité. Comme les Boliviens d’ailleurs. Au FSM de Dakar, on parle beaucoup brésilien et espagnol dans les rues. Comme si ces langues de charme permettaient d’inverser l’histoire. L’Amérique latine de Morales, de Lula et des deux mamies y est pour beaucoup dans ce mouvement altermondialiste. C’est elle qui a accueilli la plupart des grandes manifestations internationales du mouvement et qui a accouché des premières victoires… Peut-être qu’aux prochains Forums, nous voudrons tous parler arabe ?!

10 ans d’amour planétaire

Voilà donc plus de 10 ans que notre famille bipolaire se fréquente. 10 ans que notre union stratégique d’artificiers Nord-Sud fait sauter des murs et bâtit des ponts. Sur le campus de l’Université Cheikh Anta Diop, je marche dans cette foule de gens venus de 130 pays et je me demande qui peut revendiquer une aussi belle famille que la nôtre, plus complète ? Désormais composée de chefs d’États d’Amérique du sud, de paysans burkinabés, de soixante-huitards qui n’ont jamais renoncé, de jeunes suédoises écolos en jeans bio, de parias indiens et de moins que rien africains, de militants broches à foins des quatre coins, de rastaquouères de la côte ouest américaine, de réfugiés politiques, d’intellectuels à la hauteur, d’universitaires courageux et de poètes ?

C’est certain ; si Victor Hugo, Simone de Beauvoir, Gandhi, Léo Ferré, Malcom X, Rosa Park ou Hannah Arendt vivaient encore, ils seraient avec nous, ici, en train de fomenter, au sein des forces sous marines.

*

Le Forum social mondial est le Noël des altermondialistes, l’occasion de se rasséréner le ponpon-révolution. De célébrer. On y boit ensemble. On porte des toasts à des choses impossibles, comme le renversement des dictatures immuables, par exemple. Et puis soudain, comme par magie, à l’autre bout du monde, les révolutions se font simultanément. Au dernier jour du FSM de Dakar, une foule réunie pour entendre les conclusions des tables de convergeance du forum, a appris en direct le départ d’Hosni Moubarak du palais présidentiel égyptien. À côté de moi, deux vieux paysans du Maghreb sont tombés à genoux. Je les ai vu pleurer, la tête plongée dans leurs mains caleuses de travailleurs.
Pleurer et finalement s’embrasser. Enfin.

Sur le moment, il nous a semblé qu’un parfum de jasmin traversait le monde entier. Il nous a semblé que toutes les révolutions à faire étaient possibles. J’ai entendu l’élue des verts au parlement européen, la franco-norvégienne Eva Joly s’écrier : « 50 ans de néolibéralisme économique, c’est très peu. La parenthèse achève ! »

Tunis-Dakar-La Paz

Parmi nous se trouvaient des centaines de jeunes tunisiens et égyptiens pour rappeler que les forces sous marines de chez eux, réunies et alimentées depuis 2004 par les forums régionaux, ont joué un rôle central dans la mise au monde de leurs révolutions. Incidemment, Evo Morales s’est aussi présenté ici comme un « élève des forums sociaux ». Lula Ignacio Da Silva dira la même chose.

Les forces sous-marines avancent. Il faut célébrer quand les choses avancent. Il faut être capable de le voir. C’est important pour le moral des peuples, le moral des majorités. Les Brésiliens ont compris cela. Ils savent se réjouir. Les forums sociaux servent aussi à goûter l’arak, les mojitos et les shooters au gingembre équitable. On se rassure, on se pince, on se touche. On existe vraiment. Et on est sacrément nombreux et puissants. Le feu est bien vivant. Il vient de loin et s’inscrit dans une histoire, une cohérence.

Cette année est celle où les forces prennent conscience de la profondeur de leur vague. Nous sommes des millions à partager cette conviction très simple ; la richesse matérielle n’est rien, les liens qui nous unissent les uns aux autres sont tout. Comme Thomas Sankara, nous aspirons à quitter ce monde en ne léguant qu’une bicyclette.

Les grandes questions qui nous unissent

L’État ne fait pas son boulot d’État. Le privé avance et son emprise n’est pas une bonne idée. Globalement, les paysans s’appauvrissent. La Terre aussi. Et nous ne voulons pas cela. L’argent des peuples est dévié par des voleurs en complets vestons dans les paradis fiscaux du grand banditisme. Nous ne voulons pas cela. On pratique une politique de chasse à l’homme honteuse sur les frontières de l’Empire. Les changements climatiques feront sortir les océans de leur lit si on ne change pas nos manières d’occuper la terre.  Les grandes compagnies d’extractions se comportent comme des sauvages en Afrique et en Amérique du Sud. Nous ne voulons pas cela. La dette des pays pauvres continue de tenir des peuples entiers dans la misère. La politique d’Israël en Palestine est aussi inacceptable que l’apartheid sud africain. Etc.

Au fond, ce qui nous lie est cette intuition qu’au-delà de la crise avérée d’un modèle de société globalisé, nous vivons une crise de la civilisation. Comment faire pour changer le cap? Comment infuser la politique de nos pays nordiques pour qu’il y ait d’autres Brésil, d’autres Bolivie ? Est-ce que nos petits gestes quotidiens suffisent ? Probablement pas. Mais comme l’a écrit Edgar Morin, qui s’y connaît bien en résistance : « il ne faut jamais minimiser la portée du petit geste ».

À la prochaine fois

Sur le chemin du retour, je croise de nouveau l’Homme blanc en complets gris-MBA. Des Africains en complets gris-MBA les ont reconduits à l’aéroport. De nouveau, ils se sont vendus des porte-avions, des crédits de carbone, des barils de BPC à enfouir, des actions sur la prochaine catastrophe humanitaire. Pendant que nous fêtions, les princes internationaux ont fait des affaires avec les princes locaux. Dans leur langues-marchandises, avec leurs mots-camouflages appris à la même école du cannibalisme et du marketing. Ils se sont une fois de plus échangés ces richesses qui ne leur appartiennent pas.

Ils vont bientôt tenter de nous coloniser les cellules, de nous brader l’ADN, de ranger nos confins inestimables dans des comptes secrets en Suisse si on ne dit rien. Ils vont encore nous prêter à gage, nous engager pour trois générations, nous marcher sur les pieds et sur ceux de nos enfants si on ne dit rien. Ils vont encore profaner l’héritage des anciens et occuper l’espace politique dans nos parlements si on ne dit rien.

Il faut parler. Plus. Occuper l’espace comme des mamies brésiliennes. Je les croise justement sur le tarmac de Dakar, par hasard… Au moment de disparaître dans leur aéronef, elles rigolent encore. Les forces sous-marines montent dans ces avions qui les remènent à Rio, à Montréal, à Londres, à Genève, à Kinshasa, à Delhi. Aujourd’hui déjà, elles ont retrouvé leurs habits quotidiens, à l’ateliers, à l’usine, au parlement, dans leurs studios, leurs rues, leurs agoras.

Et l’histoire du feu se poursuivra. Les révolutions se feront, car les révolutions finissent toutes par se faire. (Et chaque fois, les forces sous-marines y seront pour quelque chose).  Rendez-vous à Montréal, en 2013 ?

Hugo Latulippe

 

Samedi le 18 septembre aura lieu à Montréal une soirée politico-artistique pour soutenir le combat contre le projet de loi 103. Organisée par la Coalition contre la loi 103, cette soirée vise à rassembler des milliers de personnes décidées à se battre pour conserver la langue française au Québec.

La loi 103 du gouvernement Charest n’empêchera pas les parents francophones ou allophones d’utiliser le passage de leur enfant dans une école anglaise non-subventionnée afin, par la suite, de leur faire suivre toutes leurs études en anglais dans le système public anglophone. Le projet de loi rend la chose un peu plus difficile mais toujours accessible aux parents fortunés.

Québec solidaire fait partie de la Coalition contre la loi 103. Parce que nous refusons les passe-droits à des familles aisées. Parce que le devenir de la langue française nous interpelle. Parce que nous tenons à ce que nos enfants et petits-enfants vivent ici en français. Nous le devons bien à tous ceux et celles qui se sont battus, depuis des centaines d’années, pour que survive le français en terre d’Amérique. Pour nous, la diversité culturelle est l’une des richesses de l’humanité.  Le peuple québécois s’est largement développé en français,  sa culture en est imprégné,  c’est dans cette langue qu’ont fleuri des poèmes, des chansons, des livres, des manuels scolaires, des discours inoubliables.

Vous voulez vivre en français ? Venez en grand nombre au centre Pierre-Charbonneau, à Montréal, ce samedi à 19.30 hrs.
Nous pourrons nous y rencontrer !

Françoise David

Cher Dany Laferrière,

Eh bien voilà, vous avez gagné le combat des livres à l’émission de Christiane Charrette. Des 5 livres en compétition, le vôtre était le meilleur, je n’en ai jamais douté. Et pourtant, ce fut un combat épique!

Premier jour : tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil. On présente nos livres, on se mesure à nos adversaires avec civilité, on se sourit beaucoup.

Deuxième jour : trois concurrents décident d’éliminer « L’homme invisible/invisible man de Patrice Desbiens au grand désespoir de Thomas Hellman qui défend ce livre avec beaucoup d’éloquence. Un beau livre, poétique et qui sonne vrai et dru. La parole d’un franco-ontarien qui expose sa dualité identitaire avec maîtrise. Je défends ce livre. Thomas perd, il en est un peu triste.

Troisième jour : les trois mêmes s’en prennent à L’énigme du retour. Leur stratégie est simple : éliminer le meilleur comme ça ils auront une chance de gagner. Je m’y attendais. La joute est rude, certains arguments faisant appel à une certaine démagogie : c’est trop facile, ce n’est pas un choix audacieux, ce roman est moins pertinent que le Survenant pour exprimer les débats identitaires d’aujourd’hui. Oui, le Survenant : un beau roman… mais qui se passe en 1910 et n’a pas grand-chose à voir avec les questions complexes d’aujourd’hui. Thomas défend votre livre brillamment. Je travaille fort moi aussi. Finalement, c’est Christopher Hall qui sauvera la mise en décidant à l’ultime minute qu’après tout, il ne peut pas éliminer votre si beau roman. C’est donc Jean Barbe et son « Comment devenir un ange » (bon livre, au demeurant) qui passera à la trappe du combat des livres.

Quatrième jour : je respire un peu. Christiane Charrette nous apprend que le débat portera sur le Survenant et sur le Cantique des plaines de Nancy Huston. Je défends ce dernier livre car la complexité des personnages m’intéresse et la description sociologique de l’Alberta des pionniers est tout simplement fascinante. Je perds, c’est le Survenant qui se rendra en finale.

Cinquième jour : le grand jour. On est tout un peu nerveux, surtout Christian Dufour et moi. Il défendra son choix avec la dernière énergie allant jusqu’à implorer Christopher Hall de l’appuyer. Moi je ramène mes arguments principaux : L’Énigme du retour est un livre d’une grande poésie, sa structure narrative est vraiment originale. C’est le livre d’un retour au pays de l’enfance, et sa puissance évocatrice me touche infiniment. Ce livre doit être dégusté lentement, pour en apprécier chaque strophe, qu’elle décrive un paysage ou une rencontre ou bien qu’elle assène, mine de rien, une grande vérité existentielle. Thomas Hellman ajoutera que c’est un livre  qui décrit la complexité identitaire d’aujourd’hui et la richesse d’un Québec métissé mais regroupé autour d’une langue commune.

Et finalement, votre livre est sacré vainqueur. Au total tout le monde est heureux. Le combat est terminé et plusieurs conviennent que L’Énigme…était le meilleur livre.

Toute une expérience! J’ai aimé…avec réserve. C’est stressant, amusant, stimulant. Mais lorsque l’on tente d’éliminer un livre parce qu’il est le meilleur, c’est vraiment bizarre. Nous ne sommes plus sur le terrain de la littérature mais sur celui d’un jeu un peu cruel.

Je suis honorée, cher Dany Laferrière, d’avoir porté les couleurs d’un livre qui a enchanté mon automne. Tout le mérite de la victoire vous revient.

Bien à vous,

Françoise David

C’est reparti! Il aura fallu que la SAAQ et la RAMQ prennent des décisions pour le moins discutables et le Québec entier s’énerve. Mais non, je ne suis pas d’accord que l’on exige un-e employé-e du même sexe que le sien dans un service public. Je fais une exception pour les personnes malades ou vieillissantes qui réclament des personnes de leur sexe pour des soins intimes, par exemple. Et je crois que là-dessus tout le monde s’entend.

Le Québec est une société laïque où règne la mixité des sexes, à l’école, à l’hôpital, dans les CPE, dans les services publics. C’est comme cela que nous voulons vivre ici. Et que veulent vivre la quasi-totalité des personnes immigrantes.

Là où je décroche, c’est quand tout le monde se remet à s’énerver. Oui il faut mettre des balises aux accommodements. Non ce ne sont pas tous les immigrants-es qui demandent des accommodements pour des raisons religieuses mais une infime minorité. Donc, il n’y a aucune raison de faire de cette question un drame national.

Il faut dire que le gouvernement Charest manque singulièrement d’audace et de bon sens en refusant un débat public sur l’épineuse question de la laïcité au Québec. Nous n’avons pas élaboré de modèle. Chacun-e y va de sa définition de la laïcité. On s’inspire parfois de la France sans toujours connaître toute la situation. Sait-on qu’en France, par exemple, l’école religieuse privée est largement subventionnée par l’État? Pour un pays où la laïcité a force de loi depuis 1905, c’est étonnant, non?

Respirons par le nez. Il y a eu quelques demandes d’accommodements déraisonnables. Il faut y voir. Mais savez-vous que 0,3% seulement des enfants de la Commission scolaire de Montréal ont demandé des accommodements ces dernières années? Pourtant plus de 50% des élèves sont nés hors Québec.

Ce qu’il faudrait? Un véritable débat sur la laïcité suivi de l’adoption d’un texte, charte ou livre blanc, ou… Quelque chose de clair qui aide à tracer la ligne. Dans le plus grand respect, bien entendu de valeurs fondamentales telles que l’égalité entre les femmes et les hommes.

Il faut l’exiger du gouvernement Charest!

Françoise David

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